Le Col Sainte-Anne : un site archéologique majeur
Luc Poussel fait partie des jeunes Simianais à l’origine du Club Archéologique de Simiane. Sa passion pour l’archéologie naît à l’âge de 12 ans. Issu d’une famille de chasseurs, il avait l’habitude d’arpenter la colline et ses grottes et c’est lors d’une de ces promenades qu’il découvrit des fragments de poteries qui sortaient de la terre au bord d’une route au niveau du Col Sainte-Anne.
Cette route avait été tracée en 1967, après un incendie violent au niveau de la chaîne de l’Étoile qui avait failli conduire à l’évacuation du village. Lors de sa construction, les ouvriers découvrirent plusieurs squelettes. Une fois alertée, la gendarmerie transmit l’information à la Direction Régionale des Antiquités. Des fouilles furent alors menées, notamment par le chercheur du CNRS, M. Lagrand, sur ce qui allait devenir le site archéologique du Col Sainte-Anne.
À 14 ans, sans connaître l’historique des premières fouilles, Luc Poussel découvre lui-même les traces d’anciennes installations humaines. Des fouilles clandestines avaient été récemment réalisées.
Avec ses amis, il commence à tamiser les déblais et met au jour des poteries, mais les services archéologiques de l’époque n’autorisaient pas la participation des mineurs. Ce n’est qu’à ses 18 ans qu’il participe officiellement à des stages de fouilles encadrés par un maître de recherches du CNRS, spécialiste de la Préhistoire.

Grâce à ces nouvelles investigations, des céramiques datant de 5 500 ans avant J.-C. sont identifiées. Avec une autorisation officielle du maître de recherches du CNRS, Luc Poussel poursuit les recherches durant quatre années, avec le soutien de spécialistes de la protohistoire, et de l’histoire. Les fouilles révèlent un ensemble de vestiges allant de la Préhistoire jusqu’au XIVe siècle.
En 1982, le chercheur du CNRS André Muller découvre sur le site la tombe d’une femme datant de 6 600 ans avant J.-C., période correspondant à l’apparition de l’élevage, de l’agriculture et de la poterie en Provence. La position du corps et le contexte de l’inhumation indiquent déjà une empreinte religieuse du site. Des tessons de poteries de type Cardial (6 600 ans avant J.-C.) ont également été trouvés sur le site.

Du Roi Nann à Gyptis : Simiane, aux origines de Marseille
Vers 600 avant J.-C., les Grecs arrivent en Provence aux alentours des mois d’avril-mai. Selon les récits, le roi local, Nann, donne sa fille en mariage au chef grec, Protis, et leur offre en présent les terres de Massalia (Marseille). Après la fondation de Massalia, les grecs donnèrent un nom grec à la fille de Nann : Gyptis. Peu de gens savent que les terres offertes aux Grecs provenaient de Simiane-Collongue, territoire de la tribu des Ségobriges, délimitée par les cours de l’Huveaune et de l’Arc.
Ce moment marque le passage entre la protohistoire – période racontée par des sources étrangères – et l’histoire, transmise par les habitants eux-mêmes. Le Col Sainte-Anne est au cœur de cette charnière historique.
Aujourd’hui, la richesse du site est connue des passionnés. Jusqu’en 1986, le Club Archéologique de Simiane poursuivait les fouilles, notamment sur le Col Sainte-Anne et la villa romaine. Les objets mis au jour sont conservés au musée archéologique de Simiane, situé dans l’hôtel de ville. Ce lieu est aussi le berceau de l’Union Archéologique des Bouches-du-Rhône, créée en 1986, qui regroupait à l’époque 25 associations. Seules trois existent encore aujourd’hui.
Depuis, les fouilles sont réservées à des professionnels et nécessitent un financement important. Le bénévolat formé, qui fut longtemps moteur de la recherche archéologique locale, n’est plus autorisé. Les nombreux sites découverts par ces passionnés à Simiane n’ont pas été repris depuis.
Enfin, les fouilles ont révélé que le Col Sainte-Anne était un site densément peuplé dès 6 600 avant J.-C., si bien que certains habitants ont dû se déplacer et fonder le village du Baou-Roux. Le Col Sainte-Anne, quant à lui, semble avoir été réservé aux chefs et aux religieux. Des villages voisins se sont ensuite développés pour accueillir le reste de la population.
Pour en savoir plus, la bibliothèque de Simiane propose l’ouvrage « Malheur aux vaincus » de Luc Poussel, qui retrace cette passionnante histoire locale.
Comme symbole de l’ancrage de Simiane-Collongue dans l’histoire, la municipalité a fait installer en mai 2025 une statue du Roi Nann au niveau du rond-point d’entrée de ville.
